mercredi 4 janvier 2017
Lettre n° 4 – Votre enfant est unique
Contrairement aux idées reçues,
il n’y a pas que les enfants uniques qui sont… uniques. Les parents qui ont deux
ou plusieurs enfants savent cela. « On
a beau les élever de la même manière, ils sont différents », soupirent-ils
assez couramment.
En vérité, il n’est pas très
exact de dire que les enfants d’une même fratrie reçoivent la même éducation
(on n’élève pas exactement le second comme on a élevé le premier, et ainsi de
suite). De surcroît, « l’assemblage » génétique de chacun, au moment
de sa conception, le rend universellement… unique. « L’encyclopédie »
du génome humain1 n’a pas encore délivré tous ses secrets, mais nous
pouvons affirmer sans nous tromper que l’humanité ne connaît pas deux personnes
identiques. C’est un peu comme si chaque être était un univers à lui tout seul.
Il est pourtant vrai que l’enfant
ressemble à ses parents, et cette ressemblance n’est pas seulement physique.
En vertu de ces similitudes, les
parents peuvent être tentés de mettre les pas de leur enfant dans les leur ou
dans ceux de ses frères et sœurs. C’est une inclination bien légitime et très
humaine. Quand on s’investit pleinement dans l’éducation de son enfant, on
aspire à le voir s’engager là où on pense que ce sera le mieux pour lui, ou
pour son bien. Parfois, on fait des comparaisons « moi, à ton âge… ». Ou encore, on prend exemple sur d’autres
enfants qui semblent mieux réussir… Mais, pas d’inquiétude, les parents des « petits
prodiges » érigés en modèle disent exactement la même chose à leurs propres
enfants.
La première découverte pour un
parent est de comprendre que son enfant va ouvrir un chemin nouveau,
précisément parce qu’il est unique. Avoir un, deux, trois, quatre… enfants,
c’est accepter que chacun va offrir son lot de surprises. Il y aura des
déceptions, mais aussi d’incroyables satisfactions.
Nous savons aussi que l’enfant,
si génial soit-il, n’est jamais à confondre avec un fonds d’investissement. Il
en est même qui échappent radicalement à « leur destin », ouvrant une
trajectoire diamétralement opposée à leur histoire personnelle ou à tout ce
qu’ils ont appris.
Jean-Baptiste Poquelin, fils de Tapissier
du Roi, est devenu… Molière.
Steve Jobs, d’origine syrienne
par son père, est abandonné par sa mère. Adopté à sa naissance, il deviendra le
fondateur visionnaire de la puissante société Apple.
Mohed Altrad2, fils de
bédouin, a été sacré premier entrepreneur du monde en 2015.
Les exemples ne manquent pas.
D’autres suivent une route plus
« conforme » à ce qui leur a été transmis. On peut parfaitement
réussir sa vie dans les deux cas de figure.
La richesse de la vie naît d’abord
de sa diversité. Que dirions-nous si toutes les fleurs du jardin étaient
exactement les mêmes ?
Vous vous désolez parfois des
mauvais résultats scolaires de votre enfant. Vous le trouvez lent, pas
suffisamment réfléchi. Vous vous échinez à lui faire apprendre ses leçons, ses
devoirs sont bâclés. Il est même dissipé en classe, rien ne l’intéresse.
« Mais que va-t-il faire plus tard !
? » Votre inquiétude n’est pas à blâmer. Elle témoigne de l’ambition
que vous nourrissez pour votre enfant, mais aussi de l’amour que vous lui
portez. Votre deuxième découverte sera d’accepter que tous les enfants ne
peuvent pas être premiers de la classe, ni forcément accéder à la première
marche du podium. Mais, en même temps, vous aurez acquis la certitude que toutes
sortes de chemins peuvent mener à toutes sortes de réussites.
Quand on se met à douter (et cela
peut arriver), c’est qu’il est temps de porter un regard différent sur son
enfant. Il ne s’agit pas de le laisser au fond de son échec ou dans ses
erreurs, mais de poser sur lui un regard de confiance. Vous l’aiderez ainsi à
révéler ce qu’il porte d’unique et d’exceptionnel. Les enfants ne le montrent
pas forcément, mais ils sont très sensibles au regard qu’on leur porte. Je
dirais même qu’ils ont tendance à se construire en fonction de ce regard.
Si le regard n’est pas confiant,
l’enfant n’aura pas confiance en lui (et pas davantage confiance aux autres). Si
le regard n’est pas encourageant, l’enfant ne sera guère courageux dans ce qu’il
entreprendra. Si le regard n’est pas valorisant, l’enfant se trouvera sans
valeur et ne fera rien de bon. Votre regard ne doit pas seulement voir ce qui
est, mais espérer dans ce qui n’est pas encore là et qui peut advenir. Soyez comme
ce jardinier qui regarde avec confiance la graine qui tarde à germer. Il ne
sait pas encore ce qu’elle donnera, mais il est déjà prêt à accueillir son
fruit comme un don.
Votre troisième découverte sera donc
de comprendre que, parce que votre enfant est, en soi, un don unique, la force
de l’Espérance que vous lui témoignez jour après jour pourra être la source de
la plus belle épiphanie.
Thierry Fournier
1 Programme ENCODE, ENCyclopedia Of Dna
Elements
2 Mohed
Altrad, Badawi, Actes Sud, 2002